Jean-François Piège, l’expérience gastronomique
Jean-François Piège n’est pas né il y a quatre ans avec Top Chef. Avant cette période, il faut se souvenir que ce dernier était clairement identifié dans la case « petit génie de la gastronomie française » : précoce (chef du Plazza à 30 ans, 3 étoiles au Michelin là bas à 31), déjà médiatisé sur les plateaux télé, une fois au Crillon la polémique arrivait chaque année quand Jean-François Piège « n’a toujours pas eu sa 3ème étoile » (il restera à 2 au Crillon, comme dans le restaurant actuel) …
Cela étant dit, j’y vais avec un certain enthousiasme, car vue de l’extérieur (c’est à dire Top Chef, oui moi aussi…) la cuisine de Jean-François Piège me parait féminine, méticuleuses et incroyablement bien conceptualisée (notion importante pour moi que beaucoup de grands chefs oublient).
L’ambiance chez Jean-François Piège
Bon, je le dis tout de suite comme ça c’est fait : on est mal assis (espèce de banquette où l’on doit faire un effort abdominal pour avancer sa tête jusqu’à la table). Je pense que c’est la touche Costes (associé dans l’affaire).
Sinon, le lieux est très agréable avec sa cuisine vitrée où vous pouvez vérifier si Jean-François Piège est là ou non (il était là).
Le service est très bien et pas trop présent malgré la petite taille des lieux (20-25 couverts).
L’assiette de Jean-François Piège
On comprend rapidement que ce restaurant n’est pas un gastro classique : le déroulement du repas se veut plus ludique et rythmé que ce que l’on a l’habitude de vivre. Son menu s’appelle d’ailleurs « La règle du je(u) ». Le principe ? une alternance de finger food, de mouillettes, de trucs à casser avec sa cuillère, de plats en cours de cuisson que l’on vient vous faire sentir à table, etc. C’est la seule fois que je reconnais un trait de caractère de Jean-François Piège en ligne avec son physique de « grand enfant avec sa bonne bouille ».
On commence par un assortiment de mises en bouche : « gelée de verjus, foie gras des landes« , « mon jambon beurre cornichon« , « cromesqui de brandade de morue« , « fleur de choux marinée, huile grillée« . Tout est parfait, on commence à entrevoir le côté ludique du repas (par exemple, des liquides cachés dans une enveloppe solide).
Nous enchaînons sur une « Saint Jacques comme des chips, oeuf de cabillaud fumé« . Le jeu continue : vous composez vous même votre bouchée avec une tranche de Saint Jacques et les différents éléments de l’assiette. C’est excellent.
Arrive ensuite une des choses les plus surprenante que l’on ait pu me servir : « mouillette de pain, jus au château d’Arlay, neige de persil« . Un peu septique (je ne souhaitais pas du tout, mais du tout, manger un morceau de pain imbibé de vin jaune). Retour en enfance direct par la grande porte ! les saveurs vous rappellent le jus de poulet que vous avez tant aimé saucer, vous découvrez une texture vraiment agréable et vous ne comprenez pas comment on peut faire cette mouillette sans jus de poulet (j’ai dû rappeler le resto pour me faire confirmer qu’il n’y en avait pas). Bravo !
Nous poursuivons sur une séance « finger food » avec un bouchée de « moelle et queue de boeuf » et un » « spontex » au raifort » (une espèce de mie de pain à la texture d’éponge) à tremper dans deux condiments « coriandre-menthe et truffe« . Encore génial.
Avant dernier hors d’oeuvre : un « bouillon de boeuf, infusion de cèpes, foie gras, quignons de pain, truffe noire« . Le foie gras est l’espèce de couronne durcie que vous apercevez sur le dessus, à travers laquelle vous est versé le bouillon. Vous cassez la couronne, le foie gras se ré-hydrate dans le bouillon. Génial d’inventivité et d’explosion de saveurs. Encore exceptionnel décidément.
Nous terminons cette séance par une « royale de foie blond selon Lucien Tendret 1892, crustacés« . Nouvelle explosion de saveurs et de textures différentes (foie, émulsion, écrevisses), excellent.
Nous entamons les plats (oui, nous n’étions que sur les hors d’oeuvre) par un « homard bleu, eau de coco, pâte de piment, coriandre, citron vert« . En cours de cuisson, le homard nous est amené afin de nous faire sentir les saveurs. Bonne idée.
Le plat est exceptionnel : le bouillon relève subtilement les saveurs de ce produit magnifique.
Nous poursuivons par un « ris de veau de lait, cuit entier, endive de pleine terre, truffe noire « . Jean-François Piège + ris de veau exceptionnel + jus à la truffe, ça fonctionne plutôt bien en fait ! Encore un plat sublime.
Côté dessert, nous commençons par une « mandarine corse, peau confite, jus en sorbet, gelée, crémeux, pâte à baba, pétale de rose, safran « . C’est léger, la peau confite est succulente, les saveurs de la mandarine sont vraiment mises en valeur. Un grand dessert.
Nous poursuivons par le dessert signature de Jean-François Piège : « blanc à manger d’œuf, cœur coulant« . Les téléspectateurs de Top Chef l’auront déjà vu (comment fait-il pour être aussi précis et méticuleux ?). Dessert moins complexe que le premier, mais vraiment surprenant pour ceux qui n’ont pas regardé Top Chef. Île flottante inversée façon 3 étoiles.
Nous terminons par une « crème aux œufs à la bergamote », parfait pour terminer ce festival, servie dans une magnifique boite aux formes du logo du restaurant.
Côté vins, la carte est très fournie mais très haut de gamme, donc très chère. Nous sommes partis sur un Chambolle-Musigniy de chez Cécile Tremblay « les Feusselottes » 2009, très bien pour l’ensemble du repas.
En bref, un repas exceptionnel qui situe Jean-François Piège au top des expériences culinaires que j’ai eu l’occasion de vivre (seul Gagnaire était au même niveau). Tout y est : finesse, produits, expérience ludique et association de saveurs toujours justes. Ce qui est impressionnant, c’est que Jean-François Piège vient nous surprendre des jeux où je ne l’attendais pas forcément : changements de texture, jeu chaud-froid, trompe l’œil (c’est pas Thierry Marx qui est supposé faire ça ? ) … Du grand art !
Addition : j’ai pris le menu à 164 euros (choix de 2 plats parmi 4 choix), avec un seul plat, le menu est à 134 euros. Il existe un menu déjeuner à 99 euros.
Rapport qualité/prix coupdefourchette.fr : Courez-y !!
Jean-François Piège 79 rue Saint Dominique 75007 Paris 01 47 05 79 79
Tips : galère pour avoir une table mais le site est bien fait pour cela (attention, que 30 jours de résa maximum). Demandez à ne pas être assis sur une banquette, ne confondez pas avec la brasserie Thoumieux du rez-de-chaussée. Comme tout gastro, c’est très copieux et long, prenez vos dispositions (par exemple, ne déjeunez pas si vous y allez le soir).
Dans le même style (deux étoiles au Michelin ou plus à Paris) : Passage 53 (Paris 2e), Arpège Alain Passard (Paris 7e), Pierre Gagnaire (Paris 8e). Voir aussi Le Pré Catelan (Paris 16e) dans mes flops 2013.
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English
Jean-François Piège is one of the most reknown chief of France (2 Michelin Stars, Top Chef jury member …). The lunch I spent there was exceptionnal. I really recommend it as one of the top table of Paris. Price : 99 € for lunch set, 134 €-164 € for diner + wine.
Ça donne envie! Le homard et le blanc manger me tentent trop!
J’attendais avec impatience de lire ton avis… Je suis ravie que tu aies aimé autant que moi ! 🙂
http://periplesgourmands.over-blog.com/
Pour mon avis à moi 🙂
Bravo pour le site en général et merci pour la narration de votre repas chez Jean François Piège (simple précise et pertinente)
Anne-Laure, je confirme les deux. Le premier dessert était même encore mieux.
Coline, oui tu peux voir que j’ai beaucoup apprécié 😉
Sébastien, merci !
Niveau 3 étoiles ? Il faut croire qu’il a progressé,mon repas était selon moi de niveau 2 macarons,en tout cas votre article a le mérite de me replonger dans cet excellent restaurant.